17 janvier 2023

Brexit : comme un goût d’amertume

En 2020, le Royaume-Uni quitte officiellement l’Union Européenne après 7 ans de débats qui ont vivement animé et polarisé la vie politique du royaume. Depuis le départ effectif, les premiers effets du Brexit se font sentir. Éclairage sur l’origine et les conséquences de la sortie du Royaume-Uni.

Pour commencer, un peu d’histoire

Lors de la construction de la Communauté Économique Européenne (CEE), le Royaume-Uni n’a pas fait partie des pays fondateurs. Au contraire, il est à l’initiative de l’Association Européenne de libre-échange (EFTA) qui prend forme à travers la convention de Stockholm en 1960. Néanmoins, en 1961, le pays dépose, tout de même, sa candidature pour rejoindre la Communauté Économique Européenne (CEE). La France, à l’époque présidée par Charles DE GAULLE, pose son veto à deux reprises, en 1963 et 1967. Finalement, après le déblocage des négociations, le Royaume-Uni finit par rejoindre la Communauté Économique Européenne (CEE) en 1973.

Une adhésion particulière

Depuis son entrée au sein de la Communauté Économique Européenne (CEE) qui deviendra ensuite l’Union Européenne, le Royaume-Uni a toujours tenu une place particulière. Comme en témoigne le Rabais britannique parfois appelé le "Chèque britannique". Margaret THATCHER, alors première ministre, obtient cette faveur en 1984 en invoquant que la participation à la Politique Agricole Commune (PAC) bénéficiait moins au Royaume-Uni.

Et le référendum dans tout ça ?

On y vient ! En mai 2010, David CAMERON (parti Conservateur) est élu premier ministre. Néanmoins, n’ayant pas une majorité absolue au parlement, sa nomination tient à une coalition avec Libéraux-Démocrates. Il faut ajouter qu’en 2013, le parti eurosceptique, UKIP, prend de l’ampleur. En difficulté au niveau politique et souhaitant marginaliser une fois pour toutes les eurosceptiques, il indique souhaiter organiser un référendum sur la sortie du Royaume-Uni de l’Union Européenne, s’il est élu pour un second mandat en 2015.

Bien que David CAMERON souhaitait un maintien au sein de l’Union Européenne, pourquoi cette manoeuvre politique ? Après avoir négocié avec succès auprès de l’Union Européenne pour plus de flexibilité, David CAMERON voulait montrer nationalement, qu’il pouvait négocier avec l’Union et que le royaume avait un avantage à rester dans celle-ci. Le succès de cette négociation devait seller un vote en faveur du maintien au sein de l’Union Européenne. Cependant, la finalité du referendum fut totalement différente en juin 2016.

Le Brexit

Suite au référendum, Theresa MAY devient premiere ministre de l’État britannique. Les négociations pour trouver un accord sont lancées. Du côté européen, le français Michel BARNIER est nommé négociateur en chef pour l’Union Européenne. Néanmoins, les négociations s’enlisent. En 2019, Boris JOHNSON devient premier ministre et finit par arracher un accord et sauver le royaume d’un "No Deal". Il faut dire que de nombreux points sensibles était en jeu, notamment sur la frontière irlandaise.

Les effets visibles du Brexit

Il y a tout d’abord la perte de confiance en l’économie britannique qui conduit à une dépréciation de la Livre Sterling. Les importations deviennent donc plus couteuses (il faut plus de Livre Sterling pour acheter une même quantité d’euro). Ce mécanisme entretient la tension inflationniste déjà bien alimentée par la reprise économique post-covid et la crise énergétique. Bien entendu les ménages sont directement touchés tout comme les entreprises qui perdent en compétitivité.

Quitter l’union douanière européenne s’est transformé en contrainte pour les entreprises britanniques. Les démarches administratives étant importantes, les clients européens préfèrent se tourner vers des fournisseurs européens. Ainsi, de nombreuses entreprises perdent une grande part de leur clientèle. Certaines ont même fait le choix de s’installer sur le continent afin de pouvoir poursuivre leurs activités.

D’un point de vue macroéconomique, le Produit Intérieur Brut (PIB) aurait été 5% plus élevé si le royaume était resté au sein de l’Union Européenne. Du point de vue des investissements, la Banque d’Angleterre indique qu’ils ont diminué de 25% sur la période 2016-2021.

Et à long terme ?

Sur le plan commercial les difficultés du pays pourraient s’aggraver. Bien que le royaume souhaite se tourner vers d’autres pays pour commercer, se tourner vers les États-Unis, la Chine ou les pays du Commonwealth impliquent une augmentation des couts de transports qui ne sont pas négligeables.

L’absence du royaume sur certain marché très concurrentiel au niveau de la qualité des produits (techniques, technologies …) peut mener à ne pas inciter aux gains de productivités. Ce qui aurait pour conséquence d’affecter à long terme la compétitivité des entreprises britanniques.

Habitué à un flux de main-d’oeuvre étrangère, notamment d’Europe de l’est, le marché du travail risque d’être également perturbé à l’échelle nationale. Il faut ajouter que la diminution des investissements pourrait s’installer durablement et ainsi fragiliser l’économie du royaume.

Un exemple à ne pas reproduire

En amont de la sortie effective du Royaume-Uni, d’autres pays européens faisaient face à des eurosceptiques à l’échelle nationale. Les difficultés de l’État britannique ont tu et marginalisé les partisans de la sortie de l’Union Européenne. Il faut également préciser que le Royaume-Uni possédait déjà la Livre Sterling. Sa sortie aurait été bien plus douloureuse si le royaume aurait du abandonner l’euro pour créer sa propre monnaie.

Quand l’incertitude n’aide pas

Le passage éclair de Liz TRUSS au 10 Downing Street a alimenté l’incertitude politique et économique du royaume. Ses réformes fiscales qui devaient mener à la suppression et l’allégement de certaines taxes auraient provoqué un manque à gagner de plusieurs dizaines de milliards de livres pendant de nombreuses années. Le secteur financier a sanctionné ces réformes. La livre sterling s’était alors dévaluée tout comme les obligations britanniques (Yield Bond). La Banque d’Angleterre a même finit par réagir en urgence avec son Emergency Bond-Buying Program.

Et maintenant ?

Les effets négatifs du Brexit sont indéniables et touchent directement les ménages ainsi que les entreprises. Au sein de l’opinion publique, considérer que la sortie de l’Union Européenne fut une erreur, s’installe peu à peu. Cela ne veut pas pour autant dire que le royaume va faire volte face et se tourner de nouveau vers le contient. Au delà de polariser et envenimer de nouveau le débat national, cela serait un aveu d’erreur pour les brexiters.